Que signifie le fait de ne pas supporter les troubles psychologiques chez les autres, selon la psychologie ?

Es-tu de ces personnes qui changent de sujet dès qu’on parle de dépression ?

Tu sais, cette situation ultra-gênante où ton pote commence à évoquer son burn-out et où tu sens immédiatement le besoin de regarder ton téléphone ? Ou quand ta collègue mentionne ses crises d’angoisse et que tu balances direct un « ah bon, mais tu as essayé le sport ? » avant de parler météo ? Si tu reconnais ces réflexes, bienvenue dans le club très fermé des personnes allergiques aux troubles psychologiques des autres.

Et non, tu n’es ni un monstre ni quelqu’un de particulièrement égoïste. Cette réaction d’évitement face à la souffrance mentale d’autrui est beaucoup plus répandue qu’on ne l’imagine, et elle cache des mécanismes psychologiques fascinants. Cette intolérance aux troubles dépressifs et aux crises d’anxiété révèle des processus de défense inconscients qui en disent probablement plus sur toi que sur la personne en face.

Le grand malaise : pourquoi on fuit les conversations « psy » ?

Première chose à comprendre : cette gêne n’arrive pas par hasard. Selon les travaux de l’Orspere-Samdarra, un observatoire spécialisé dans l’accompagnement des personnes en situation de précarité psychique, le rejet de la souffrance mentale d’autrui fonctionne comme un système de protection sociale. En gros, on écarte ce qui dérange notre petite bulle de « normalité » pour préserver notre propre sentiment de sécurité.

Mais creusons un peu plus. Tu as déjà remarqué comme certaines personnes deviennent littéralement agressives dès qu’on évoque la dépression ou l’anxiété ? Elles sortent des phrases du genre « il faut se secouer », « c’est dans la tête » ou encore « de mon temps, on appelait ça de la flemme ». Cette véhémence cache souvent une peur panique de se reconnaître dans la fragilité de l’autre.

Le truc, c’est que notre cerveau est programmé pour éviter tout ce qui pourrait nous rappeler notre propre vulnérabilité. Et devine quoi ? La souffrance psychologique des autres, qu’il s’agisse de troubles bipolaires, de dépression majeure ou d’attaques de panique, c’est exactement le genre de miroir qu’on préfère éviter.

Les mécanismes de défense qui nous trahissent

Alors, comment ça marche concrètement dans ta tête quand ton voisin t’explique qu’il prend des antidépresseurs ? Eh bien, ton psychisme active ce qu’Anna Freud appelait les mécanismes de défense. Ces petits programmes automatiques nous protègent de l’angoisse que pourrait générer la confrontation à la fragilité humaine.

Le déni, par exemple, c’est ce réflexe de minimiser : « Oh tu sais, tout le monde a des coups de mou ». En refusant de reconnaître la réalité de la souffrance de l’autre, tu évites soigneusement de t’imaginer dans la même situation. C’est malin, mais pas très empathique.

La projection, c’est encore plus vicieux. Tu vas inconsciemment attribuer à l’autre tes propres difficultés refoulées. Le mec qui balance « moi, je n’ai jamais eu besoin d’aide de personne » avec un air de défi ? Il projette probablement sa propre terreur de la dépendance ou de l’abandon. En gros, plus tu rejettes violemment la « faiblesse » des autres, plus tu révèles tes propres peurs cachées.

L’intolérance à l’incertitude : quand l’anxiété des autres nous angoisse

Tu fais peut-être partie de ces personnes qui ont construit leur équilibre mental sur l’illusion du contrôle total. Tu planifies, tu anticipes, tu maîtrises. Et là, paf ! Ton ami t’explique qu’il fait des crises de panique sans raison apparente. Soudain, ton monde bien ordonné vacille parce que la réalité de l’imprévisibilité psychologique te saute à la figure.

Les recherches en thérapies cognitivo-comportementales montrent que l’intolérance à l’incertitude pousse certaines personnes à développer des stratégies d’évitement émotionnel. Concrètement, entendre parler des troubles anxieux de quelqu’un d’autre te rappelle brutalement que la vie n’est pas totalement contrôlable et que nous sommes tous potentiellement vulnérables aux épisodes dépressifs ou aux troubles de l’humeur.

Pour quelqu’un qui a basé sa stabilité psychologique sur le fantasme du contrôle absolu, cette confrontation devient littéralement insupportable. Du coup, rejeter la réalité des troubles psychologiques d’autrui devient une façon désespérée de préserver sa propre construction mentale. C’est pour ça que certaines personnes réagissent avec tant de véhémence face aux troubles mentaux : elles défendent leur propre système de survie psychologique.

La rigidité émotionnelle : quand la vulnérabilité fait peur

Parlons maintenant des profils particulièrement concernés par cette intolérance. Les personnalités évitantes ou obsessionnelles, selon les classifications psychiatriques, ont souvent développé une rigidité émotionnelle comme mécanisme de survie. Pour elles, maintenir un contrôle strict sur leur environnement émotionnel n’est pas un luxe, c’est vital.

Quand quelqu’un évoque ses difficultés psychologiques, ses épisodes maniaques ou ses phases de dépression, cela introduit du « chaos » dans leur vision bien rangée du monde. La souffrance de l’autre devient alors menaçante, non pas par empathie excessive, mais parce qu’elle remet en question leur système de défense si laborieusement construit.

Et là, c’est le drame. Ces personnes peuvent devenir particulièrement agressives ou méprisantes face aux troubles mentaux, pensant protéger leur propre équilibre. Sauf que spoiler : ça ne marche pas très bien sur le long terme.

Le phénomène du miroir déformant : quand on rejette sa propre image

Voici un twist psychologique fascinant : nous rejetons souvent avec le plus de force ce qui nous ressemble le plus. C’est ce que la psychologie appelle la projection, et c’est particulièrement visible dans le rejet des troubles psychologiques.

Prends l’exemple de quelqu’un qui a toujours refoulé sa propre tristesse, se construisant une image de « warrior » qui ne flanche jamais. Face à une personne qui exprime ouvertement sa dépression, il va ressentir une colère disproportionnée. Cette colère ne vise pas vraiment l’autre, mais plutôt sa propre vulnérabilité qu’il refuse de reconnaître.

Les travaux sur la projection psychologique montrent que l’autre devient littéralement le réceptacle de tout ce qu’on s’interdit d’être ou de ressentir. En le rejetant, on croit rejeter cette part de soi qu’on trouve inacceptable. C’est un mécanisme de défense aussi ingénieux qu’épuisant.

Le plus ironique ? Les personnes les plus intolérantes face aux difficultés psychologiques des autres sont souvent celles qui ont elles-mêmes vécu des traumatismes affectifs importants. Des recherches sur l’intolérance à la frustration suggèrent que cette rigidité émotionnelle masque fréquemment des blessures non cicatrisées.

Les traumatismes cachés derrière l’agacement

Tu connais peut-être ces personnes qui deviennent littéralement hors d’elles dès qu’on évoque la thérapie ou les antidépresseurs ? Paradoxalement, ce sont souvent celles qui auraient le plus besoin d’aide. L’enfant qui a grandi dans un environnement où exprimer ses émotions était interdit ou dangereux peut devenir un adulte incapable de tolérer l’expression émotionnelle chez les autres.

Sa propre souffrance, enfouie et jamais reconnue, ressurgit violemment à chaque fois qu’il est confronté à celle d’autrui. Le rejet devient alors une stratégie de survie psychologique, même si elle est devenue complètement inadaptée à l’âge adulte.

C’est comme si la vulnérabilité des autres réveillait des alarmes internes qu’on pensait avoir définitivement éteintes. Et au lieu de reconnaître ce réveil douloureux, on préfère tirer sur le messager qui nous parle de ses troubles anxieux ou de son traitement psychiatrique.

Comment reconnaître cette intolérance chez soi et chez les autres

Bon, maintenant que tu as survécu à ce cours intensif de psychologie sociale, voici les signaux d’alarme qui ne trompent pas. D’abord, l’évitement systématique : tu changes de sujet dès qu’on aborde les questions de santé mentale, tu évites les personnes qui traversent des difficultés psychologiques, ou tu minimises systématiquement la gravité des troubles mentaux.

Ensuite, la banalisation excessive : tu ramènes tout à des conseils de bon sens (« il faut juste sortir et voir du monde »), tu refuses de reconnaître la spécificité de la souffrance psychologique, ou tu culpabilises indirectement la personne qui souffre (« si tu voulais vraiment aller mieux… »).

Enfin, la réaction émotionnelle disproportionnée : tu te sens agressé ou en colère quand quelqu’un évoque ses difficultés, tu as besoin de contredire ou de « corriger » systématiquement, ou tu ressens un malaise physique important face aux confidences d’autrui. Si tu coches plusieurs cases, il y a des chances que tu sois concerné par ce phénomène.

L’impact sur tes relations : spoiler, c’est pas joli

Cette intolérance a des conséquences bien réelles sur tes relations. Les personnes qui souffrent de dépression ou d’anxiété apprennent rapidement à identifier ceux qui ne peuvent pas les entendre. Résultat : elles finissent par s’isoler ou par développer une « double vie », cachant leur vraie réalité à ceux qui ne peuvent pas la supporter.

De ton côté, tes relations restent superficielles, privées de cette authenticité qui naît du partage des vulnérabilités. Tu te prives de liens profonds et nourrissants, tout en maintenant les autres dans une solitude parfois dramatique. C’est un lose-lose de compétition.

Sans compter que cette attitude renforce la stigmatisation sociale autour des troubles psychiques, contribuant à isoler encore plus des personnes déjà en souffrance. Pas très glorieux comme bilan.

Comment sortir de cette spirale sans devenir thérapeute

Bonne nouvelle : reconnaître cette intolérance en soi n’est pas une condamnation à vie. C’est même plutôt une opportunité de croissance personnelle. Comprendre que ton rejet de la souffrance d’autrui parle avant tout de tes propres peurs peut être le début d’un travail sur soi libérateur.

La première étape consiste à observer tes réactions sans te juger (plus facile à dire qu’à faire, on est d’accord). Quand tu sens monter cette envie de fuir ou de minimiser face aux troubles mentaux de quelqu’un, pose-toi la question : « qu’est-ce que cette situation révèle de mes propres peurs ? » Souvent, la simple prise de conscience suffit à desserrer l’étau de l’intolérance.

Ensuite, il s’agit d’apprivoiser progressivement ta propre vulnérabilité. Plus tu acceptes tes propres failles et limites, plus tu deviens capable d’accueillir celles des autres. C’est un travail de longue haleine, qui peut nécessiter l’aide d’un professionnel de la santé mentale, mais les bénéfices en valent largement la peine.

Et attention, développer sa tolérance aux difficultés psychologiques d’autrui ne signifie pas devenir une éponge émotionnelle ou se sacrifier pour les autres. Il s’agit plutôt d’apprendre à rester présent face à la souffrance sans être submergé par elle. C’est ce que les psychologues appellent la « présence empathique ».

Quelques pistes concrètes pour commencer

Voici quelques stratégies testées et approuvées pour développer ta tolérance à la vulnérabilité d’autrui :

  • Pratique l’écoute sans conseil : la prochaine fois que quelqu’un t’évoque ses difficultés, résiste à l’envie de donner des solutions et contente-toi d’écouter
  • Observe tes réactions corporelles : tensions, envie de fuir, agacement… Ces signaux t’informent sur tes propres zones sensibles
  • Questionne tes certitudes : d’où viennent tes croyances sur ce qu’est une « vraie » souffrance ? Qui t’a appris que certaines émotions étaient inacceptables ?
  • Accepte de ne pas tout comprendre : tu n’as pas besoin de « résoudre » la souffrance de l’autre pour être présent

L’intolérance aux troubles psychologiques d’autrui révèle nos mécanismes de défense les plus profonds et nos peurs les mieux cachées. Loin d’être un défaut de caractère, c’est un signal que notre psyché nous envoie pour nous protéger de ce qu’elle perçoit comme une menace. Comprendre cette dynamique, c’est se donner les moyens de construire des relations plus authentiques et bienveillantes, tant avec les autres qu’avec soi-même.

Après tout, accepter la vulnérabilité humaine sous toutes ses formes n’est pas seulement un acte de générosité envers autrui : c’est aussi un cadeau qu’on se fait à soi-même, celui de pouvoir enfin être pleinement humain. Et franchement, dans un monde où tout le monde fait semblant d’aller parfaitement bien sur Instagram, c’est plutôt rafraîchissant.

Ta réaction quand quelqu’un parle de sa dépression ?
Je fuis mentalement
Je minimise
Je change de sujet
Je culpabilise l’autre
Je ressens un malaise

Laisser un commentaire